LE NOUVEAU STANDARD DE LA RACE
LE REGARD DU JUGE CRISTIAN VANTU
Critères de jugement de l’azawakh
Par le Dr Christian VANTU – Juge FCI
Je me réfère, pour décrire cette race, au très bon standard officiel et présente mon texte comme une lettre d'un éleveur et juge d’Azawakh à ses collègues. Je l’écris en pensant à l’avenir de cette race mais également aux juges désireux de comprendre ce qu’est un Azawakh et comment nous devrions juger cette exceptionnelle beauté afin de préserver sa valeur unique. Je n’ai pas estimé nécessaire de m’étendre sur les aspects évidents, mais plutôt d’insister sur les points importants qui font la différence entre un bon juge et un juge d’exception.
Brno INTERCANIS 2008
Si vous voulez juger des Azawakhs, vous devez avant tout essayer d’oublier toutes les autres races, ainsi que les formes et les proportions auxquelles vous êtes habitués. Vous devez également oublier le caractère et le comportement du chien classique. Il vous faudra être préparé à accepter quelque chose de différent.
En tant que juges nous avons l’habitude de nous référer à un modèle commun auquel tous les chiens doivent correspondre, mais dans ce cas le modèle n’existe pas. Pour percevoir le juste type de l’Azawakh, il vous faudra y consacrer du temps et élargir vos critères esthétiques.
Je me rappelle , me promenant en ville avec l’un de mes chiens, d’une très petite fille disant à sa mère « maman, regarde, un petit cheval ». Je compris alors, loin des
idées préconçues, ce que notre œil perçoit : un petit cheval. La similitude entre l’Azawakh et le cheval Arabe, surtout en allures, est évidente.
Photo 1a/1b : similitudes entre le cheval arabe et l’Azawakh
Rappelez-vous de la précédente comparaison, n’oubliez pas que la nature crée la diversité et que le « canis lupus familiaris » en est l’un des meilleurs exemples. Nous ne sommes pas là pour le changer. Nous devons plutôt comprendre que les raisons maintenant pour l’homme d’aimer cette race sont son élégance et sa fierté, et non sa fidélité inconditionnelle et son obéissance. L’Azawakh n’est pas un esclave mais peut être un adorable compagnon. Nous devons apprécier les qualités qui le rendent très important à ses propriétaires et non pas la faculté de se laisser toucher par n’importe qui, pas même par nous, les juges.
UN BREF RESUME HISTORIQUE
L’Azawakh est un lévrier africain de type afro-asiatique qui apparut en Europe à partir de 1968, provenant des zones pastorales autour de la vallée de l’Azawakh. Il a été le compagnon des nomades sud-sahariens depuis de nombreux siècles.
Le premier couple importé en Europe fut R’Eheouel et Reylane, par Gervais Coppé, puis un autre couple (dont Gao), fut ramené du Mali par un diplomate Yougoslave pour être offert au maréchal Tito. Ce couple est à l’origine de la lignée de Mme Sekalec. D’autres chiens furent importés plus tard en France, et même encore maintenant on importe des chiens de plus ou moins bonne qualité du Mali, du Niger, d’Algérie et du Burkina Faso. Il y a beaucoup de polémiques entre les éleveurs et le Club de Race au sujet des récents imports. Ils sont bénéfiques dans le cadre de la santé génétique de la race, aidant les éleveurs européens à éviter le problème de la consanguinité, mais ils ont aussi apporté de nouvelles couleurs de robes, non admises dans le standard. En tant que juges nous ne pouvons pas avoir plus que des opinions personnelles à ce sujet. Le Club de Race Français est le seul autorisé à changer le standard. Certains sujets importés ces dernières années sont d’excellente qualité, mais pas tous. Dans la hâte d’amener du sang neuf, des chiens de moindre valeur ont été utilisés pour l’élevage et le résultat se voit en exposition : des angulations trop prononcées, des fouets attachés trop haut, ou trop courts, des corps trop longs, des têtes trop larges, des expressions atypiques, des allures atypiques et dans le pire des cas : le manque de type.
ASPECT GENERAL
Particulièrement haut sur pattes et élégant, l’Azawakh donne une impression générale de grande finesse. Son squelette et sa musculature sont apparents sous une peau fine et lisse. Ce lévrier se présente comme un chien racé : le corps tient dans un rectangle dont les côtés verticaux sont les plus longs.
PROPORTIONS IMPORTANTES :
Longueur du corps – hauteur au garrot = 9/10 Cette mesure peut être légèrement supérieure chez les femelles.
Profondeur de la poitrine – hauteur au garrot = environ 4/10
Longueur du museau – longueur de la tête = ½
Largeur du crâne – longueur de la tête = 4/10
Il s’agit d’un chien court, très court, le plus court, et les proportions du corps sont un point très important dans le standard, spécifique à cette race. Il est haut sur pattes, sec, c’est une beauté architecturale avec des lignes gothiques. Vous devez remarquer que la structure osseuse et la musculature superficielle doivent être visibles. Un Azawakh en bonne condition d’exposition ne doit avoir aucune graisse. L’Azawakh doit être élégant. Il n’y a pas d’autre mot qui puisse le décrire mieux que « élégance ».
Photo 2 : proportions et angles
COMPORTEMENT/TEMPERAMENT :
Vif, attentif, distant, réservé avec les étrangers, il peut même être inapprochable, mais doux et affectueux avec ceux qu’il accepte.
L’Azawakh est plus près du fier « loup domestique » que du chien obéissant. Il faut avoir une forte personnalité pour qu’il vous accepte comme maître. C’est difficile à croire pour ceux qui n’ont jamais eu un Azawakh, mais il peut être très affectueux avec son propriétaire, quand aucun « ennemi » éventuel n’est en vue. C’est vrai, ce chien est très méfiant, mais personnellement j’aime cette caractéristique. Il faut sans doute de longues journées avant qu’il ne s’habitue à une nouvelle personne et plus encore pour qu’il l’accepte dans son environnement. C’est lui qui approchera et jamais le contraire. C’est la raison pour laquelle il n’est pas bon de les toucher quand nous les jugeons, surtout les jeunes, car cela les stresse davantage et leur fait détester les expositions canines. A cause de leur méfiance, ils ont besoin de plus de temps pour s’habituer à un nouvel environnement et à la foule. Si le chien parvient à se conduire normalement dans cette ambiance inconfortable, pourquoi le stresser davantage en le touchant. De toute façon nous pouvons tout voir, donc nous n’avons pas besoin de les toucher. Si un juge ne peut pas comprendre comment ou pourquoi quelqu’un peut accepter ce type de comportement chez un chien, c’est seulement parce qu’il n’en a jamais eu. Je ne peux personnellement imaginer un Azawakh d’une obéissance totale et inconditionnelle, ou trop sociable. J’apprécie ce caractère et c’est l’une des raisons qui me fait aimer cette race. Personne n’aime les beautés perdues mais nous aimons tous le mystère et la dignité des beautés naturelles, voir sauvages. Sachons conserver leur pureté.
Photo : le même chien qui obéit ici à une très petite fille, n’accepte pas le contact des étrangers. Tant qu’il est un parfait compagnon pour tous les membres de sa famille, et qu’il peut être correctement présenté sur un ring, sa méfiance ne doit pas être considérée comme un défaut mais comme….. une qualité)
TETE :
Longue, fine, sèche et ciselée, plutôt étroite mais sans excès.
REGION CRANIENNE
Crâne :
Il est presque plat, plutôt allongé. La largeur du crâne doit absolument être inférieure à la moitié de la longueur de la tête. La direction des axes du crâne et du museau sont souvent légèrement divergentes vers le front. Les arcades sourcilières et le front sont légèrement marqués. D’autre part, la crête occipitale est nettement protubérante et visible.
Stop : Très légèrement prononcé.
Région faciale :
Nez : Les naseaux bien ouverts. La truffe est noire ou brune.
Museau : Long, droit, fin vers la truffe sans exagération.
Mâchoire/Dents : Mâchoires longues et fortes. Dentition en ciseau.
Joues : Plates.
Yeux : En amande, plutôt grands. Leur couleur est foncée ou ambre. Les paupières sont pigmentées.
Oreilles : Posées relativement hautes. Elles sont fines, toujours pendantes et plates, larges à la base, collées au crâne, jamais « en rose ». Leur forme est celle d’un triangle avec le bout légèrement arrondi. Le bas se relève lorsque le lévrier est attentif.
ENCOLURE :
Bonne sortie de cou qui est long, fin et musclé, légèrement courbé. La peau est fine et sans fanon.
Comme tout ce qui se rapporte à ce chien, son expression est unique et difficile à exprimer. Le mieux est de se référer aux photos ci-jointes et de s’habituer à l’expression de sa tête.
photos 4-5-6 : profils et expressions correctes
L’Azawakh a un cou long et arqué, la tête est portée haute, impassible et fière.
Même le standard ne mentionne aucune faute en ce qui concerne des absences de dents et selon moi le manque de PM1 ou PM2 ne peuvent pas être un défaut éliminatoire, ce qui ne signifie pas que ce chien peut n’avoir aucune dent. Le juge devrait associer l’absence de dent avec le bien-être du chien et le pénaliser en accord avec cela. Une dentition en ciseau est la dentition correcte mentionnée dans le standard. Le prognathisme de la mâchoire supérieure ou inférieure est une faute éliminatoire et la hauteur de la mâchoire est acceptée tant qu’elle n’est pas mentionnée comme un défaut.
Photo 7 : Fouet enroulé attaché trop haut, mauvaise ligne de dessus et croupe.
Photo 8 : Fouet bien attaché et porté, croupe correcte
Corps :
Ligne de dessus : Presque droite, horizontale et légèrement relevée sur les hanches.
Garrot : relativement saillant.
Rein : Court, décharné et souvent légèrement arrondi.
Os iliaques : Nettement saillants et toujours placés à une hauteur supérieure ou égale à la hauteur du garrot.
Croupe : Oblique mais sans excès.
Poitrail : Pas très large.
Poitrine : Bien développée en longueur, profonde sans atteindre le niveau du coude. Elle n’est pas très large mais doit laisser assez de place au système cardiaque, si bien que la région sternale de la poitrine ne doit pas devenir brusquement étroite.
Côtes : Longues, apparentes, légèrement et uniformément incurvées vers le sternum.
Ligne de dessous : La courbe sternale est accentuée et doit rejoindre le ventre en douceur. Le ventre est situé très haut sous la courbe lombaire.
Le garrot est saillant comme les os iliaques qui doivent être au même niveau ou plus hauts que le garrot. Les os iliaques plus bas que le garrot doivent être considérés comme une faute grave.
Chez les chiens qui ont une peau moins épaisse les côtes sont parfois plus marquées que de coutume et cela ne doit pas être pénalisé tant que, en allures, le chien conserve une bonne ligne de dessus bien droite.
La croupe ne doit pas être exagérément inclinée mais doit absolument être oblique, la faute la plus commune étant davantage une croupe trop horizontale qu’une croupe à l’oblique trop accentué.
Fouet :
Attaché bas, long , fin, lisse et effilé. Le poil est identique au reste du corps et possède une extrémité blanche. Il est porté pendant avec la pointe légèrement relevée, mais lorsque le chien est excité, il peut être porté au-dessus de l’horizontale.
Photo 9 : angulations trop accentuées/ Photo 10 : angulations correctes/ Photo 11 : angulations droites
Membres :
Antérieurs :
Vue d’ensemble : longs, fins, presque totalement verticaux, bons aplombs.
Epaules : longues, décharnées, musclées et légèrement obliques de profil. L’angle scapulo-huméral est très ouvert (environ 130°)
Pieds : De forme arrondie, doigts fins et légèrement serrés, les coussinets sont pigmentés.
Postérieurs :
Vue d’ensemble : d’apparence longs et secs, parfaitement verticaux.
Cuisses : longues avec des muscles apparents et secs. L’angle coxo-fémoral est très ouvert (environ 130°)
Grasset : L’angle fémuro-tibial est très ouvert (environ 145°)
Jarret : le jarret et son articulation sont droits et décharnés, sans ergots.
Pieds : ronds avec des coussinets pigmentés.
L’Azawakh a des angles ouverts aussi bien aux membres antérieurs qu’aux postérieurs mais jamais d’articulations droite du jarret ni d’angles trop fermés.
Les métatarses doivent être verticaux mais chez les chiens qui ont une cuisse un peu plus longue, l’angle formé par les os du métatarse avec la jambe est inférieur à 145 . Il est évident alors que les métatarses ne sont plus aussi verticaux. Cela ne doit pas être considéré comme une faute grave si cela n’affecte pas l’apparence générale et l’allure. Mais des jarrets trop droits ou des angulations trop prononcées qui affectent le type spécifique et le mouvement ne sont pas souhaités et doivent être pénalisés.
Les antérieurs doivent être parfaitement droits mais sont très souvent ouverts sur environ 5-10 degrés, ce qui ne doit pas être considéré comme une faute grave. Les postérieurs doivent également être droits.
Allures :
Elles doivent être très souples, d’une grande sveltesse, avec un mouvement particulièrement élevé au trot et au pas. Le galop est bondissant. L’Azawakh donne une grande impression de légèreté, voir même d’élasticité. L’allure est un point essentiel de la race .
Photos : 12-13-14-15
L’Azawakh a des angles très ouverts qui rendent impossible une grande extension des membres, mais ceci est compensé par la longueur des pattes qui lui permettent de couvrir du terrain. Un chien qui serait trop angulé peut aussi avoir une allure spectaculaire mais n’aura pas l’allure caractéristique et ne doit donc pas être privilégié. Ainsi que c’est mentionné dans le standard, l’allure, le type d’allure plus précisément est essentiel à la race. En observant les antérieurs en mouvement (au trot) on constate qu’ils ont une action élevée due à l’extension de l’humérus (partie du haut de la patte) et non à une flexion exagérée du radius qui serait un mouvement « piaffé » et doit être pénalisé. C’est une faute très fréquente dans les jugements de l’Azawakh. Un chien qui a toutes les caractéristiques du standard mais un trot lourd ou un mouvement piaffé ne peut pas être considéré comme méritant un titre de champion.
A la marche, sur un sol dur certains Azawakhs plient davantage leurs coudes et lèvent leurs pattes trop haut comme s’ils piaffaient mais le même chien doit avoir une bonne allure si les proportions et les angles sont corrects. C’est une très bonne raison pour nous de juger du mouvement au pas où toutes les fautes sont visibles.
PEAU :
Fine et collée au corps.
ROBE :
Poil : court, fin, pratiquement absent du ventre.
Couleur : Fauve avec des mouchetures limitées aux extrémités. Toutes les nuances sont admises, du sable clair au fauve foncé. La tête peut ou non être masquée noire et la couleur est très variable. La robe a un poitrail blanc et la pointe du fouet est blanche. Les quatre membres ont obligatoirement des « chaussettes » blanches, tout au moins une trace sur les pattes. La bringeure noire est admise.
Cette pigmentation est déterminée par le « S I » (la série des allèles S, le 2ème allèle dit à « panachure irlandaise ») qui donne moins de 20% de blanc. Si le chien a du blanc sur la poitrine et, ou sur le cou, ainsi que sur 2 ou 3 membres, la plupart du temps le blanc est présent sur d’autres parties également mais moins prononcé. Si vous cherchez bien vous trouverez sans doute juste quelques poils blancs entre les doigts ou les coussinets. Ce n’est pas considéré comme un défaut.
TAILLE ET POIDS :
Taille au garrot : Mâles : de 64 et 74 cms / Femelles : de 60 à 70 cms.
Poids : Mâles : entre 20 et 25 kgs / Femelles : entre 15 et 20 kgs.
DEFAUTS :
Tout écart des points répertoriés doit être considéré comme une faute et cette faute doit être jugée proportionnellement à son importance.
- Aspect général : lourd.
- Crâne trop large.
- Stop exagéré
- Corps trop long
- Les os iliaques nettement plus bas que le garrot
- Dépigmentation prononcée de la truffe.
FAUTES ELIMINATOIRES :
- Manque de type (en particulier lorsqu’il traduit un croisement récent avec une autre race)
- Importante déformation anatomique non accidentelle
- Anomalie handicapante – non acquise
- Tous les vices rédhibitoires habituels
- Prognathisme supérieur ou inférieur
- Œil clair dit œil d’oiseau de proie
- Côtes courbes à la base de la poitrine qui prendrait alors l’allure d’une « boîte à violon »
- Robe non conforme au standard
- Poil dur ou mi-long
- Absence de toute marque blanche à l’extrémité d’un ou plusieurs membres
- Taille dépassant de 3 cms les mesures du standard
- Caractère timide, paniqué ou agressif avec attaque
Lorsque vous jugez un Azawakh, avant de prendre la décision de le disqualifier pour cette raison, rappelez-vous de ce qui est marqué au paragraphe du standard COMPORTEMENT/TEMPERAMENT :
« … distant, réservé et peut même être inapprochable ». Si le chien est agressif ou attaque sans raison, vous devez le disqualifier mais vous ne devez pas essayer de le toucher si vous sentez qu’il le refuse. Ceci est valable pour beaucoup de lévriers mais cela devient pratiquement une règle en ce qui concerne l’Azawakh. Lorsque vous jugez de jeunes chiens au milieu de la foule des rings d’expo, rappelez-vous que cette race est habituée aux grands espaces et à moins de monde. Nos expositions ne correspondent pas à ses habitudes, il est donc normal d’essayer de conserver chez cette race ses caractéristiques et sa dignité. Laissez-leur le temps de s’habituer à notre façon de vivre. Tenez compte également des erreurs de présentation. Parfois, peut-être presque toujours, c’est le plus grand problème et à cause de cela le chien « ne peut pas être jugé ». Il ne doit pas être disqualifié pour une faute de comportement.
Photos 3-5-6-12 : Vantu et Sipos/Insolens – Roumanie
Photos 1/b, 13 : Susannah Thyni/ ZounAdu- Suède
Photos 14, 15 : Corinne Lundqvist/de Garde-Epée – France
Photo 2 : A.u.U.Hochgesand/ Aulad al Sahra’s – Allemagne
Photo 4: David Moore/ Idiiyat-es-Sahel - USA
CHRONIQUE D'UNE MYSTIFICATION
LA RETREMPE DE L'AZAWAKH AVEC LE SLOUGHI
En 2002, des membres de notre club de race ont exprimé leur inquiétude devant le nombre réduit de géniteurs utilisés pour la diffusion du Lévrier de l'Azawakh en Europe, redoutant la poursuite de la consanguinité initiale, et ses effets néfastes.
En fait, ces éleveuses auraient pu s'en prendre à elles-mêmes d'avoir eu recours à un lot très étroit d'étalons, toujours les mêmes : Firhoun, Geffel, Greboun....
Elles ont aussi saisi le cas hypothétique de maladies : « syndrome de Wobler, épilepsie »... sur lesquelles on ne tenait que des suspicions, mais aucun diagnostic précis fondé sur un matériel statistique.
Un généticien, le Pr Denis, sollicité par Mme Seigneur, avait alors préconisé trois mesures pour remédier à une situation générale de restriction du pool génétique :
- d'abord : utiliser le plus possible de reproducteurs mâles, à la limite presque tous les mâles qui naissent, ce qui paraît une mesure sage et facile à adopter;
- ensuite : avoir recours à des animaux importés bien typés, mais à contrôler sur la descendance (livre d'attente sur trois générations),
- et, en ultime recours, envisager la retrempe avec une race voisine; le sloughi étant alors indiqué, puisque 20 ans plus tôt Sloughi et Azawakh avaient pu être considérés un temps comme deux variétés d'une même race.
-
Devant cette troisième mesure, seulement envisagée par un scientifique n'ayant pas l'expérience particulière de nos races, l'assemblée générale de Brissarthe (20 juillet 2002) a exprimé sa nette opposition (rapport du président Meunier). Et, par la suite, le comité n'a fait que confirmer son hostilité à une telle éventualité.
Mais cette hypothèse d'élevage a été ensuite gonflée comme une baudruche et brandie comme la monstrueuse erreur du Slag, qualifié par la personne au centre de cette offensive (Mme Lundqvist) de « risée du siècle pour la cynophilie mondiale », rien que cela...
Toute rumeur ayant la peau dure, cette menace a été savamment entretenue par un petit groupe orchestrant une dissidence, et cherchant à influencer puis à contrôler le Slag, en s'exprimant sur le net au moyen de plusieurs sites et blogs, et lançant même une pseudo « pétition internationale » demandant la disqualification de notre club à exercer la tutelle sur le standard du Lévrier de l'Azawakh.
En fait, cette pétition n'est qu'une liste de leurs relations et clients (et pour certains, sans leur accord explicite), ne comportant aucun nom d'autorités reconnues par la F.C.I. : ni zootechnicien ou naturaliste, ni généticien ou africaniste. Bref, cette pseudo-pétition qui est ré-apparue récemment, tel le monstre du Lochness, n'est qu'une imposture à épisodes, mais qui engage des personnes peu et mal informées, certaines n'ayant d'ailleurs aucune relation avec cette race. Nous vivons l'époque du « pétitionnisme »...
Ce motif de la retrempe associé au Wobler et à l'épilepsie a été depuis amalgamé par ces gens à la noble raison de ne pas pratiquer du « racisme » en accueillant sous le label « Lévrier de l'Azawakh » tous les types et les couleurs de chiens que l'on rencontre sur les routes du sahel, un risque que le Pr Denis avait déjà bien pressenti et dénoncé. Ces apprentis-sorciers entonnant le refrain qui justifie un tel laxisme :« Mais ces chiens existent au Sahel !...Et ils représentent du sang neuf et frais à importer d'Afrique !... »
On peut rire de ces inepties, mais elles constituent l'élément principal du programme de liquidation de la cynophilie de ce groupe factieux; alors que la cynophilie, elle, à l'opposé, prétend s'appuyer sur la pratique de la sélection.
Le rappel de cette position sans appel prise par notre club en 2002 devrait contribuer à éteindre les braises de cette rumeur, et à étouffer la dissidence en cours.
C'est le voeu des responsables de la race au sein du comité du Slag !
Documents joints:
PARLONS UN PEU DU "COLLIER BLANC"...
Le débat n'est pas nouveau; les puristes de la lutte pour limiter "l'extension du blanc" l'ont réclamé à corps et à cris : considérer l'extension du blanc autour du cou, jusqu'à former un collier, comme un défaut éliminatoire.
Reprenant ces injonctions, le comité du Slag a confirmé dans la version précisée du standard adoptée le 22 janvier dernier la prohibition du "collier blanc". Sans plus de détails. Laissant au juge la possibilité de ne pas pénaliser un sujet à la morphologie excellente, mais présentant une légère remontée de blanc au niveau du cou, sans la qualifier de quart ou de huitième de collier. Et la petite tâche (bien limitée) sur la nuque, si courante, est expressément admise. Ce sont les commentaires du standard à l'adresse des juges qui devront opérer ces mises au point, et dire l' esprit de cette restriction.
Sans vouloir jouer au cuistre, rappelons, comme Ewa le faisait récemment pour rassurer des éleveurs, que nous connaissons bien le facteur génétique qui pilote cette expression du blanc dans le pelage : c'est le fameux gène S.i. (spotted irish = panachure irlandaise), responsable des tâches blanches variables, à savoir les balzanes, la liste en en tête, le pinceau du fouet, et le plastron avec une remontée aléatoire autour du cou. Mais ce n'est pas la robe-pie, qui, elle, est pilotée par un autre gène (S.p.) qui a toujours été écarté du standard, depuis 1973.
Hélas la génétique est une loterie, dont le caractère aléatoire peut révéler bien des surprises lors du croisement des gamètes. Aussi avons-nous bien des fois découvert l'arrivée au monde de chiots à la généreuse panachure irlandaise, issus de géniteurs présentant tout juste le minimum de blanc requis par le standard... En ce qui me concerne, pour éviter tout éventuel conflit d'intérêt, je n'avais pas demandé la confirmation de Emeker comme de Berzit, présentant pourtant une morphologie bien conforme, et même excellente, avec une franche collerette blanche.
Le juge Jean-Louis Grünheid nous faisait remarquer lors du récent débat que la panachure irlandaise est un trait constitutif du Lévrier de l'Azawakh-Oska, et que l'interprétation très restrictive de son expression ne lui semblait pas "génétiquement logique".
Notre réponse -et notre accord avec Grünheid- est de nous en tenir à l'affirmation toute cynophilique que le collier blanc n'est pas conforme à l'image que notre standard affirme depuis sa première rédaction en 1973. Considération esthétique que nous avaient léguée les éleveurs-chasseurs dahoussaaqs et touaregs, à l'époque.
Nous touchons là un point de divergence entre la zoologie et la zootechnie, dont relève la cynophilie.
Un document d'archive des années 70 me rappelle d'ailleurs que le naturaliste Bruno Lamarche, un des rédacteurs du standard, affirmait bien son attachement à cette restriction, et pour une raison uniquement esthétique, reprise auprès des nomades. Cette archive sera ici publiée.
En quarante années, rien de bien nouveau sous le soleil de notre petite planète !...
LEXIQUE : AZAWAKH - OSKA - LEVRIER DE L'AZAWAKH ?
La façon dont on nomme les choses renseigne certes sur leur substance, mais aussi sur le regard que nous leur portons, et donc sur nos compétences, nos carences, nos attentes, ou nos lentilles déformantes.
Rappelons qu'à son arrivée en France en 1968 notre chien a d'abord été appelé "sloughi". Puis, sur le conseil avisé et critique des connaisseurs du sloughi, notre recherche nous a amené à proposer "lévrier touareg", ou "lévrier berbère", ou "oska".
C'est le dictionnaire touareg-français de Charles de Foucauld qui nous a indiqué le terme "oska" comme parfaitement univoque et présent dans les divers dialectes des Kel Tamajeq, dialectes relevant tous de la langue berbère, appelée par ses locuteurs "amazirt".
Les enquêtes de terrain de Maryvonne Parigi et de Bruno Lamarche (en 1970-72) et récemment les nôtres en compagnie de Jean-Louis Grünheid dans le Tassili des Ajjer (en 1999-2000) ont confirmé ce fait, attesté par les lexicographes qui donnent au terme oska une ancienneté d'au moins deux millénaires.
En langue touarègue, le "beau lévrier" (dixit Foucauld) est nommé "oska", "idi" étant le terme générique pour désigner le chien, "aberoh" et "abaïkour" désignant une forme mâtinée de l'oska. L'hétérogénéité des types dans un même espace géographique n'est donc pas un phénomène nouveau. Ce qui nous montre bien que les éleveurs sahariens ont pratiqué un élevage discriminant (une sélection) depuis l'origine de leur culture. Les catégories de leur langue nous le révèlent. Ainsi les choix dits arbitraires que nous avons opérés en établissant puis en précisant, dernièrement, le standard, ne font que prolonger, perpétuer les choix de nos illustres prédecesseurs dans le façonnage de cette race canine.
Malgré l'appellation que notre "Club du Lévrier Touareg (Oska)" avait proposée en 1973, en s'appuyant aussi sur le travail (la thèse de vétérinaire) de François Roussel, la FCI a adopté, pour une raison administrative que nous n'admettions pas, la dénomination "Azawakh". Certes ce terme est court, bien sonnant, mais il n'est pas juste : Azawakh étant un terme géographique qui désigne une vallée sèche, et dans la langue des pasteurs, un vaste espace de paturages généreux.
Cette erreur frustrante nous a amené depuis trente années à ne jamais oublier les appellations "lévrier de l'Azawakh" et "Oska". Ce qui explique que dans le récent travail de précision du standard nous avons insisté pour que la nouvelle version se réfère à ce vocable, et que le préambule du texte mentionne aussi ce nom précis et pertinent: Oska. Et plus précisément, d'ailleurs, car il n'y a pas une parfaite correspondance entre les systèmes vocaliques du touareg et du français, il faudrait écrire "Ouska".
Cette mise au point posée, rappelons que le terme "azawakh" est aussi associé à une race de vache, un grand zébu (bos indicus), à la robe acajou, au bel encornage en lyre, aux yeux fardés, et bonne laitière...
Mais nous les amateurs continuons d'appeler nos compagnons "azawakh, aza..." ou "mon tout fou, ma chérie, mon chouchou", au fil de nos sentiments, et de notre bonheur. Et tant mieux !
Cette appellation exprime bien la familiarité affective qui nous lie à ces chiens, mais n'oublions pas que du point de vue zoologique elle est erronée, voire ridicule ! Le seul nom juste, pertinent, étant "Oska" ou "Ouska", et à la limite "lévrier de l'Azawakh".
Rassurons-nous, d'autres races canines subissent aussi une telle méprise dans leur dénomination. Ainsi le terme "Barzoï" est-il un générique signifiant simplement "lévrier" en langue russe; et "Chart (prononcer Hart) Polski" le terme générique pour le lévrier de Pologne...
L'ÉLABORATION DU STANDARD NE FUT PAS UN LONG FLEUVE TRANQUILLE !
En feuilletant mes archives "Oska", qui me baladent dans quatre décennies de ma vie, je réalise à quel point la vision que nous avons eue de nos compagnons a été fluctuante, ressemblant au profil d'un cours d'eau, alternant le jaillissement, le cours torrentueux, l'étal apaisé, les ramifications vers des cours d'eau voisins, les cataractes, la retenue, voire l'apparente disparition, mais aussi les prélèvements et le détournement; et puis le gonflement, l'affirmation de son existence, et la reconnaissance par les riverains.
Cette métaphore du fleuve, nous allons l'illustrer par quelques scènes et discussions de cette histoire, puisées dans notre mémoire, en ordre aléatoire.
En 1970, quand fut relancée l'activité du Club du Sloughi, sous la présidence de Charles Duconte, et avec Jean-Marie Devillard aux manettes du secrétariat, le premier couple reproducteur (R'éhéouel et Reylane) fut inscrit au LOF comme Sloughi. R'éhéouel fut même inscrit sur la liste des étalons recommandés, et qualifié d'hyper-sloughi.
Mais les connaisseurs du sloughi de l'époque étaient un peu gênés par le type de ce chien, sa finesse, et les balzanes. M. Devillard et d'autres personnes furent d'avis de le garder en réserve pour la retrempe du sloughi, et d'envisager à terme la création d'une variété appelée sloughi touareg. Ce qui n'empêcha pas durant quelques années de croiser sloughi et oska, et de supprimer à la naissance les chiots ayant une panachure généreuse.
A ce moment, après 1970, arrivèrent d'autres sujets en provenance de la vallée de l'Azawakh, importés par les Parigi, puis par Chaventré, et en Yougoslavie le couple prélevé à Ménaka par Michel Doche pour être offert au maréchal Tito; ce qui a donné la lignée d'Europe centrale.
En France, au sein du club, la discussion allait bon train. Nos chiens furent mis en réserve du LOF, et nous sommes allés chercher de l'information auprès de diverses sources :
- auprès d'Henri Lhote, au Musée de l'Homme, pour s'assurer de l'identité de ce chien et des modèles représentés sur les parois du Tassili des Ajjer, datées de l'époque bovidienne (3500 av.J.C.);
- auprès de Pierre Capron de Caprona, linguiste au CERN de Genève, qui mit à notre disposition un riche catalogue de citations attestant la présence du lévrier dans les langues anciennes d'Afrique et du proche orient;
- et auprès de Xavier Przezdziecki, dont l'intérêt et l'érudition furent une source de longues discussions.
Mais M. Przezdziecki fut réticent à reconnaître, dans un premier temps, l'origine africaine, saharienne, de ce chien, s'en tenant à l'origine asiatique du sloughi; l'oska étant pour lui une forme dérivée (bâtarde) du sloughi.
Persuadés de l'identité propre de ce chien, nous avons alors milité pour la reconnaissance de la race "Lévrier touareg (Oska)", et créé à cette fin un club (régi par la loi de 1901) associant Mazel, Parigi, Chaventré, Vannier, et François Roussel qui est intervenu alors en préparant sa thèse de doctorat vétérinaire sous la direction du professeur Queinnec. C'était en 1973.
Le travail de Roussel a été une base scientifique de référence, utilisée pour le dossier que nous avons ensuite présenté à la FCI. Mais cette thèse est un travail mené rapidement par un étudiant, en vue d'obtenir son habilitation professionnelle. Elle a pu nous fournir des éléments explicatifs d'ordre génétique, mais son travail d'investigation préparatoire a laissé des lacunes sur les sociétés humaines qui ont façonné ce stock canin.
Un premier standard a donc été rédigé par François Roussel, avec la contribution de notre club, et de Bruno Lamarche, un naturaliste ami des Parigi, qui fit de nombreuses missions de terrain au nord du Mali.
Quel nom donner à cette "nouvelle" race canine ? Roussel avait bien posé dans sa thèse la palette des noms possibles, mais finalement la F.C.I. a préféré abandonner la référence à un groupe humain et ne tenir compte que de la référence géographique actuelle (en 1970) : la vallée de l'Azawakh.
Cette première version du standard a permis à nos compagnons de sortir de l'ombre, de la clandestinité administrative, mais nous lui avons trouvé dès son adoption des défauts et des carences :
- l'origine socio-géographique de cette race n'était pas rapportée, ou en des termes flous et faux;
- le terme Oska, parfaitement pertinent et univoque dans la langue touarègue n'était pas cité;
- la robe décrivait les six points blancs obligatoires, mais pas en les considérant comme l'expression nécessairement variable de la panachure irlandaise (le gène S.i.), laissant place alors à un certain fétichisme esthétisant, qui a permis ensuite une dérive coloromaniaque;
-et la bringeure n'était pas acceptée. On dit que cet ostracisme est dû au juge Lelong, qui voulait éviter la confusion avec le galgo et le sloughi, qui eux peuvent être bringés...Cette erreur a pénalisé une partie du cheptel pendant vingt années.
Bruno Lamarche a vite relevé les erreurs de ce premier standard, mais il a fallu ensuite des années de démarche insistante auprès du SLAG, club dépositaire du standard, pour obtenir les modifications bien justifiées.
A propos du caractère arbitraire d'un standard.
On sait bien que tout standard dresse l'état des lieux d'un stock génétique présentant une relative homogénéité à partir de la combinaison de deux séries de facteurs :
- l'adaptation à un milieu naturel (qui peut conduire à constituer un isolat génétique),
- et l'intervention de l'homme qui, par la sélection, projette ses besoins économiques et ses valeurs, ses croyances, ses critères de beauté.
Le standard ayant pour fonction de geler et de pérenniser le phénotype obtenu.
En enquêtant auprès des éleveurs-chasseurs de la vallée de l'Azawakh, et en soumettant à leur appréciation des photos et des dessins, nous avons eu confirmation du caractère relatif, arbitraire, de tout standard; ce qui nous permet d'oser confier que nous, cynophiles européens, avons apporté la dernière couche à ce document devenu officiel en Europe. Oui, le standard actuel est marqué aussi par notre subjectivité. C'est l'empreinte de notre passion !
Énumérons quelques-unes des "fantaisies" que nous avions prises pour argent comptant, et inscrites dans une des épures du standard, avant 1981 :
- l'obligation d'au moins un ongle noir par membre. En fait, la griffe mélaninée étant plus dure sera plus résistante à la course sur un sol rocheux;
- une lignée "noble" n'a que un ou deux chiots par portée. On sait que l'obésité des femmes tourègues imajeren ("nobles") les rend parfois stériles et souvent peu prolifiques. Cette exigence pour le chien semble être la pure projection d'un constat fait dans la société, renforcé d'une croyance. Mais en fait, la sous-nutrition des lices peut provoquer des avortements spontanés;
- ce chien est un "élément d'apparat", phrase encore présente dans une version récente du standard. André Chaventré, qui avait travaillé chez les Imajeren (nobles), avait même précisé "élément de blason", véritable projection ethnocentrique. Cela fait sourire quand on sait que les Imajeren (comme les Ineslemen,maraboutiques) ne chassent pas, et expriment du mépris pour le chien;
- quand on le suspend par la peau du dos le chien "noble" ne doit pas se plaindre;
- etc... c'est un vrai bêtisier que l'on pourrait ici dresser...
Le dernier écueil rencontré et évité dans le pilotage de notre standard a été la tentation d'admettre et de produire les robes diluées. Cette production a été amorcée dans au moins un élevage en Europe, malgré la non-conformité au standard.
Ce périlleux avatar fait l'objet d'un autre article de ce blog.
Mais soyons rassurés : le club exerçant la tutelle sur la race vient de rétablir l'ordre en classant la dilution parmi les défauts éliminatoires.
(à suivre...)